Hybride humain-animal, monstre et héros

Dans cet article, je vous propose un tour non exhaustif des figures monstrueuses issues de la fusion entre l’humain ou l’animal.

Les oeuvres de la littérature, de la bande dessinée et du cinéma où l’humain et l’animal sont liés par une relation de métamorphose sont nombreuses. Les deux personnages sont deux parties de la même personne. Ils se comportent parfois différemment certes, mais cette différence ne sert qu’à montrer la cohésion profonde, souvent tragique de ces deux entités. La cohabitation de l’humain et de l’animal au sein d’un même personnage est un thème créatif. Dans les oeuvres, elle est présentée comme monstrueuse, génère une forte tension et elle mène souvent à un destin tragique, ou une issue fatale pour le personnage. Ou bien, elle doit rester masquée au risque de provoquer la peur et le rejet.

Il est possible de répartir ces figures selon le critère suivant : la part dominante est humaine, ou au contraire animale. Quelle part fait le monstre ou rend le personnage plus monstrueux ? Ces êtres hybrides jouent-ils un rôle dans la civilisation ?

L’humain-animal

La part animale qui peut se manifester en nous, car elle fait partie de nous, n’est pas mauvaise : quand nous avons soif, faim, quand nous avons besoin de bouger, courir, nager, dormir aussi, c’est elle qui se manifeste. De même quand nous désirons et quand nous nous battons pour notre survie.

Selon les sciences humaines, la part animale chez l’humain correspond également à celle qui ne supporte pas les règles sociales humaines, qui transgresse parce qu’elle ne peut pas s’accommoder de ce cadre. Elle est conduite par les instincts qui parfois s’opposent à l’éthique, à la loi, aux codes sociaux humains. Si nous laissons libre cours à ces instincts, nous devenons un être marginal et rejeté par les autres. Si nous la contrôlons, avec notre rationalité, nous nous intégrons à la société et à ses règles collectives.

Il est important d’accepter cette part animale en nous, sans la refouler, au risque de créer en nous une frustration ou du dégoût envers nos propres désirs. Parfois aussi, faire le choix de la part animale, pourrait répondre au besoin de se libérer de codes trop rigides ou devenus artificiels.

Par ailleurs, quand on veut devenir trop humain, on pourrait aussi développer en soi les mauvaises tendances humaines : l’égocentrisme, l’orgueil, la recherche du pouvoir, la manipulation, l’ambition. Avoir plus que nécessaire. Nous ne sommes plus dans la spontanéité de l’animalité, mais dans la cérébralité et l’ego humains qui font aussi les monstres. En se coupant de sa propre animalité, on ne perçoit plus le monde par les sens, dont on se méfie, ou dont on se coupe. Notre corps n’existe plus, nous ne le ressentons plus, ou nous sommes clivés. Difficile alors de goûter à l’instant présent, au contact avec la nature et à vivre en adéquation avec le temps, les saisons, etc. Nous sommes « décorpoïsés ». L’animal en nous est en contact avec son corps. Il est centré, mais non égocentré.

Ces deux parts en nous sont indissociables. Ainsi le montre Robert Louis Stevenson dans son célèbre roman : L’étrange cas du Dr Jekyll et de Mister Hyde, paru en 1886.

Ce roman ne serait pas simplement le récit d’un dédoublement de personnalité, mais aussi d’une fracture entre deux aspects intrinsèques à l’être humain qu’il n’est pas bon de vouloir séparer. Le Dr Jekyll est tourmenté par une profonde dualité : c’est un mystique qui aspire au bien, cependant il est aussi attiré par les plaisirs physiques. Il décide d’isoler ces deux tendances et crée un double de lui qui va concentrer la concupiscence et sublimer l’autre. C’est Mr Hyde.

C’est un personnage à deux faces nettement séparées, parce que l’une n’accepte pas l’autre. Le Dr Jekyll refuse une partie de lui-même qu’il n’aime pas ou qui lui fait peur, et cette partie agit malgré lui. Il ne fait pas le choix de l’harmonisation ou de l’équilibre. Il fait le choix de la scission. Pourtant si le Dr Jekyll veut contrôler Hyde, celui-ci est indifférent à Jekyll. Hyde ne s’intéresse qu’à lui-même. Peu à peu, Hyde prend plus de place, et c’est lui qui active la transformation. Il aime la vie. Il est doté d’une puissante énergie vitale animale. Néanmoins, il trouve du plaisir à faire souffrir. Il a conscience de faire le mal, mais il n’a aucun remord. Il est décomplexé, amoral, ne vit que pour satisfaire ses désirs. Son ego est hypertrophié, son intelligence manipulatrice et sadique. Cet ego et cette forme de conscience sont des caractéristiques humaines. Constatant ce débordement de Hyde, Jekyll tombe dans un état de grande détresse.

Le film, Cat People – en français La féline – de Paul Schrader, est sorti en 1982. Cat People est un remake du film de Jacques Tourneur réalisé en 1942. Une jeune femme effrayée par sa sexualité, réveille une malédiction familiale. Le désir la transforme en panthère. Dans le remake, Irina (incarnée par Nastassja Kinski) craint de se livrer au désir charnel, pour des raisons qu’elle ignore encore. Lorsqu’elle dépasse ce blocage, elle réveille la panthère en elle. Cette libération sexuelle dans son histoire familiale est placée sous le joug de l’inceste. En effet, en dehors de cette relation incestuelle, le frère et la soeur se transforment en panthère lorsqu’ils ont des rapports sexuels et tuent leurs amants. Cette transformation a été générée par un rituel  profane en Afrique et a donné lieu à une tradition familiale. Irina fait le choix de céder à la panthère qu’elle a réveillée en elle.

Dans cette histoire, l’animal incarne la sexualité inquiétante à laquelle on a peur de se livrer. La panthère représente la transgression et l’abandon à la part animale en soi. Une part libérée, non contrôlée, et fascinante bien que dangereuse.

Le mythe du loup-garou est ancien et commun à plusieurs civilisations. Il remonte à l’époque antique. La plupart des histoires d’humains se transformant en loup sont issues des auteurs classiques grecs et latins. Cependant, au Moyen-Âge, surtout en hiver dans les forêts européennes, la crainte du loup génère de nombreux récits de loups-garous et contribue à une superstition religieuse et à de nombreux procès menés par l’Inquisition pour sorcellerie. Une véritable politique de chasse aux sorcières et aux loups-garous est mise en oeuvre. Qu’un humain se transforme en loup est alors perçu comme diabolique, et comme un acte hérétique. Des centaines de personnes suspectées d’être des lycanthropes seront mises à mort sur le bûcher…

En France, deux grands procès marquent cette chasse :

Gilles Garnier est exécuté en 1573, sous l’accusation de s’être « laissé changer » en loup-garou. Dans le rapport de l’officier du roi, il est noté qu’il avait enlevé un enfant de dix ans dans une vigne et l’avait tué et dévoré. Il semble que cet homme était en réalité un assassin d’enfants.

Jean Grenier est condamné au bûcher en 1603 puis à être enfermé dans un monastère. Il parcourait la campagne déguisé en loup pour effrayer les filles de son âge. Lors du procès, il affirme être un loup-garou et avoir dévoré plusieurs enfants. La cour reconnaît son caractère pathologique. C’est la fin des procès en hérésie et le début d’une autre approche : la lycanthropie comme trouble mental.

La croyance qu’un humain peut se métamorphoser en animal perdure également en Orient. Ainsi l’homme-tigre, l’homme-léopard ou l’homme-crocodile jouent un rôle dans les légendes indiennes et africaines. Pour ce qui est du loup-garou, la transformation est causée par la morsure d’un loup ou d’un autre lycanthrope, une malédiction ou un rituel. Elle se déclenche pendant la nuit et à la pleine lune, condamnant la créature à errer sous forme de loup jusqu’au matin. Les lycanthropes sont majoritairement décrits comme maléfiques associant les capacités du loup et de l’humain. Ils sont dotés d’une très grande force, d’un puissant odorat, d’une vision nocturne. Ils ne tuent pas pour se nourrir, mais mus par une impulsion meurtrière. Ils ne se rappellent plus généralement de leurs actes après avoir repris forme humaine.

La lycanthropie a été reconnue depuis l’antiquité par des personnes comme Pline, un naturaliste, ou Marcellus de Side, un médecin. Ils y voyaient une croyance infondée. Marcellus de Side signale ce comportement comme un trouble mental. D’autres médecins, comme Avicenne, s’intéresseront à cette pathologie, en tant que telle, la désignant de différentes façons : la folie louvière, cucubuth ou lupinam insaniam, folie du loup. Actuellement, la lycanthropie est répertoriée comme un symptôme non spécifique d’une maladie mentale. Des cas peuvent être observés chez des patients souffrant de schizophrénie, de pellagre ou de porphyrie. La porphyrie est une pathologie génétique. Elle pourrait expliquer les cas de lycanthropie manifestes pendant l’antiquité et le Moyen-Âge.

En fin de compte, notre loup-garou est bien un humain qui pour une raison imaginaire ou réelle emprunte les caractéristiques de loup pour exercer ses pulsions agressives. En effet, dans beaucoup de cas, les personnes sont animées par des pulsions violentes. Ces pulsions agressives et dévoratrices prennent chez elles l’apparence du loup qu’en réalité elles ne sont pas.

L’animal-humain

Dans le roman À la Table des hommes de Sylvie Germain, le personnage principal Abel est un être hybride résultant de la fusion fantastique entre un cochon et un humain. Il ne croît pas à la place centrale de l’homme :

« L’homme ne cesse de se mettre au centre – de la Terre, du monde, de tout, même de Dieu. Il lui a d’ailleurs semblé que dans la plupart des religions, la place accordée à la nature et aux éléments était nulle, ou alors si réduite, et celle concédée aux animaux infime, sinon déplorable. Ces derniers ont pourtant précédé l’homme sur Terre, et des liens de filiations, tous lointains et distendus soient-ils, les relient. Tous sont des vivants.« 

Pour sa part, Abel ne se sent « au centre de rien ». Il se compare au système planétaire dans lequel tout bouge. Il sent le mouvement perpétuel dans son propre corps. Pour lui, le centre est partout et « tout est échange », « Révolution perpétuelle ». Le cochon devenu humain ne comprend pas que l’on puisse se considérer et se sentir omnicentré, car il ne perçoit pas son environnement en maître et possesseur, mais comme un élément faisant partie du tout, et le tout faisant partie de lui.

Le roman L’Île du docteur Moreau de H.G. Wells a été publié pour la première fois en 1896. À la suite d’un naufrage, Pendrick arrive sur une île où le docteur Moreau a installé un laboratoire secret pour faire des expériences sur les animaux. Moreau lui explique son travail avec détachement et conviction : il assure que les créatures que Pendrick a vues n’ont jamais été des humains malgré leur apparence humanoïdes, mais des animaux. Ils ont été humanisés. Moreau précise qu’il a pratiqué la vivisection pour modeler ces animaux en de nouvelles formes de vie.

Dans ce roman, il y deux sortes de monstres :

D’abord le docteur Moreau est un personnage insensible et cruel. Il est effrayant car il fait souffrir des animaux pour les transformer en ayant recours à la vivisection. Il n’a aucune empathie pour eux. Son ambition est purement de créer de nouvelles formes de vie. Il représente la figure monstrueuse du savant animé par un projet dangereux parce qu’il s’écarte de la voie naturelle et crée un déséquilibre menaçant. De plus, il est mégalomane. Il se considère comme un précurseur, un génie, mais son but n’est ni médical ni philanthropique.

Ensuite, les monstres sont les sujets de laboratoire, animaux mutants. Ils n’ont plus rien de naturel. Ces créatures sont terrifiantes en apparence parce qu’elles sont à la fois animales et humaines, et dans la suite de l’histoire, certaines vont devenir très violentes. Ils endurent de grandes souffrances résultant de la vivisection et de leur captivité. Pendrick est très sensible à ses créatures.

« C’est le puma, dis-je, encore vivant, mais tellement coupé et mutilé que je prie pour ne plus jamais voir de chair vivante.« 

Par le biais de la fiction, ce roman traite d’un sujet délicat : la vivisection. La souffrance endurée par les animaux de laboratoire est un thème important. Ces animaux ne sont considérés que comme des objets afin de réaliser un projet qui ne les concerne pas. Les animaux ainsi humanisés souffrent à causes des interventions chirurgicales cruelles qu’on leur fait subir, et parce qu’ils sont captifs, impuissants et terrorisés. Ce projet n’a aucun intérêt pour eux.

Les héros hybrides

Les hybrides humain/animal sont très présents dans notre imaginaire. Ils peuplent les croyances, légendes, les contes, les oeuvres d’art, toute la culture humaine.

Ils peuvent être classés en deux catégories : les hybrides simples avec une partie humaine et une partie animale et les hybrides multiples avec plusieurs parties animales et un aspect humain. Ces hybrides constituent une famille importante des monstres mythologiques. Ils ont une histoire. Ils sont parfois le fruit d’une transgression sexuelle entre l’humain et l’animal, ou bien ils ont été créés lorsque le monde n’était pas encore structuré par les dieux. Leur présence montre qu’il existe toujours le risque d’un retour au monde sauvage originel. Leur existence est un constant rappel du fait que ce monde peut encore revenir.

Les hybrides simples :

Ils représentent une forme de monstruosité : Centaures et Minotaure sont encore proches des hommes avec lesquels ils vivent. Ils incarnent l’interactivité qui existe entre le monde des humains et celui des animaux.

Au fil des siècles, la représentation du Centaure a perdu ses caractéristiques originelles pour atteindre une image plus « classique », à savoir un corps chevalin, des oreilles animales, une barbe hirsute. Il y a des « bons et des mauvais » Centaures. Les bons ont une attitude d’hospitalité, et leur monstruosité réside uniquement dans leur forme. C’est leur filiation qui détermine leur bonne relation avec les humains. Les Centaures sont à la frontière entre l’animalité, l’humanité et la divinité.

Contrairement aux nombreux monstres de la mythologie, le Minotaure naît dans un espace civilisé. Par sa présence au coeur de la cité, il apporte de la sauvagerie à l’intérieur de la ville. Le Minotaure est le fruit de l’adultère de Pasiphaé avec un taureau, donc d’une transgression entre le monde des humains et celui des animaux, ce qui perturbe la voie naturelle. Le monstre hybride est nu, mais son corps et sa tête sont couverts de poils. Il est pourvu d’une queue et de cornes.

Les hybrides complexes :

La Gorgone, comme tous les hybrides, symbolise – ou permet de penser – le « désordre » de la nature avec ses transgressions diverses. La Gorgone apparaît comme un mélange d’humanité et d’animalité et de sexe mâle et femelle. La Gorgone joue sur toutes les transgressions, mais aussi sur les antinomies : elle est jeune/vieille, belle/laide, masculine/féminine, humaine/bestiale, mortelle/immortelle. Elle représente une forme de quintessence du mal. Les hommes ne peuvent pas soutenir son regard qui constitue le paroxysme de la malfaisance.

Les Gorgones – et plus particulièrement Méduse – sont des monstres multiples dont les peintres et les sculpteurs ont représenté toute l’horreur en combinant différents animaux : dents de sanglier, visage féminin, cheveux de serpents, ailes d’oiseau, corps de cheval.

L’animal utilisé pour montrer les défauts humains

Dans toutes ces représentations, l’animal est le support de caractéristiques intrinsèques. Il est utilisé dans un rapport métaphorique. Ces caractéristiques sont pour la plupart anthropomorphiques : on prête aux animaux des sentiments humains, des valeurs qui relèvent du monde humain. La notion de bestialité est paradoxale : les attributs et les notions qui sont mises sous ce terme recouvrent des réalités avant tout humaines (avidité, cruauté consciente, meurtre, abus de pouvoir, manipulation etc.) On traduit l’inconnu par des termes connus : les monstres sont inconnus et leur puissance, leur taille, leur démesure, leur animalité sont référées à des normes humaines.

Le monstre est un transgresseur, c’est sa particularité. L’humain représente ses propres transgressions en allant chercher des caractéristiques animales. Le monstre est lié au mal. Il est l’adversaire, le barbare, l’autre. Il est aux franges de l’humanité. Sa fonction est d’exorciser la peur de l’inconnu, de mettre un visage sur ce qu’on ne connaît pas. Ses travers, ses déviances et ses menaces ainsi reconnus contribuent à la supériorité de celui qui le soumet. C’est rassurant.

Galerie de héros hybrides des comics

Un petit tour du côté des super-héros des comics américains est révélateur de l’intérêt créatif de l’hybridité humain/animal. Les super-héros de ce type sont de deux catégories principales. Certains sont de simples humains qui s’inspirent d’un animal pour se créer un costume et des accessoires, et qui adoptent leurs comportements. D’autres ont acquis les capacités d’un animal ou d’un insecte leur conférant des pouvoirs surhumains. En ce qui les concerne, la part animale, qu’elle soit imitée ou acquise leur donne des capacités hors-normes par rapport à leur condition humaine.

Les super-héros humains :

Batman, créé par Bob Crane en 1939, prend l’apparence de l’homme chauve-souris, chassant les criminels la nuit, pourvu d’ailes factices.

Catwoman, créée par Bill Finger et Bob Kane en 1940, agile et intelligente, très indépendante, vêtue d’un costume moulant noir et de griffes factices, est une voleuse élégante, à ses heures justicière.

Une première Black Widow est créée par Stan Lee, Don Rieu et Don Heck en 1964, une seconde par Devin K.Grayson et J.G. Jones en 1999. Elle possède des accessoires inspirés de la veuve noire, une araignée qui dévore les mâles de son espèce : un dard émettant des décharges et des capsules adhésives pour grimper aux murs. Héroïne ambigüe, entre mal et bien.

Black Panther, premier super-héros noir de l’histoire, créé par Stan Lee et Jack Kirby en 1966. Il est originaire d’un pays fictif de l’Afrique, le Wakanda. Il porte un costume de panthère. Il est très agile, fort et ses sens sont aiguisés.

Les super-héros hybrides

Spider Man créé par Stan Lee et Steve Ditko en 1962. Il est mordu par une araignée radioactive. Cette morsure lui confère les capacités des arthropodes : grimper aux murs, faire des bonds énormes. Il acquiert aussi une grande agilité, une grande force et des sens hyperdéveloppés. Il peut lancer un fil qui lui permet de se déplacer ou d’immobiliser les malfaiteurs.

Ant Man créé par Stan Lee et Jack Kirby en 1962 peut se réduire à la taille d’une fourmi. Avec son casque, il peut communiquer avec les autres insectes dont il fait ses alliés. Il est capable de porter une charge correspondant à plusieurs fois son propre poids comme ses homologues insectes.

Animal Man, créé par Dave Wood et Carmine Infantino en 1965 est capable d’utiliser les capacités de tout animal existant. Ses pouvoirs lui ont été conférés quand il est entré dans le champ morphogénétique d’un vaisseau extraterrestre. À noter que le scénariste Grant Morrison a repris son personnage pour s’interroger sur les droits des animaux, sur le végétarisme et l’activisme écologique.

Wolwerine créé par Thomas Len Wein et John Romita en 1974, alias Logan, est un mutant aux griffes puissantes et rétractiles. Il est irascible, violent et craint pour cela. Le wolwerine est un glouton ou carcajou, mammifère carnivore que l’on trouve en Russie, en Scandinavie et au Canada.

Ce bref tour, nous permet de voir que tous ces héros ont des points communs : grâce à leurs capacités imitées ou acquises des animaux ou insectes, ils manifestent des dispositions hors-normes par rapport aux autres humains, et surtout, ils agissent dans la transgression, bien qu’ils aient des intentions empathiques ou soient animés par un désir de justice. Ils ont recours à la violence et agissent en dehors des lois pour mener leur projet.

Le monstre est donc une représentation symbolique. Il a une fonction dans notre culture. Il n’est pas forcément un être maléfique. Il peut être simplement différent. Il peut même être comique. Mais il est aussi celui qui fait mal, agresse, blesse ou tue, détruit, et il rebute, inquiète, angoisse ou terrifie. Dans sa forme maléfique, il naît et agit dans l’isolement, dans la disharmonie dont il profite. Il se nourrit du conflit à commencer par celui à l’intérieur de soi. Il est un projection des forces hostiles, à la fois révélateur et dissimulateur. On voit ici l’intérêt de lui prêter un côté animal. Il est révélateur parce qu’il montre ce qui fait peur : l’inconnu et l’incontrôlable. Il est rassurant de penser que c’est le côté animal qui fait de lui un être dangereux. C’est une façon de déguiser la réalité en lui faisant porter le masque de quelqu’un d’autre. Cependant, en tant que fonction symbolique, il aide à représenter l’inconnu qui effraie, il relie l’être humain à son histoire et son environnement, il a donc aussi une fonction cathartique.

Encore faudrait-il, selon Claude Claire Kappler, ne pas se contenter de désigner ce monstre comme une figure salutaire, en se dégageant de la responsabilité de lutter contre nos insuffisances. Alors, ces monstres qui représentent ce qui nous fait peur deviennent un pur divertissement, tandis que nous renonçons à combattre le mal qu’ils signalent.

Bibliographie :

Kappler Claude Claire, Le monstre, pouvoir de l’imposture, Presses universitaires de France, 1980.

Boudin François. « L’homme-animal : hybridité et monstruosité dans l’iconographie des vases grecs » In : L’animal symbole. Paris : Éditions du Comité des travaux historiques et scientifiques, 2019

Baratta Alexandre , Weiner Luisa, La lycanthropie : du mythe à la pathologie psychiatrique, édition John Libbey Eurotext « L’information psychiatrique » 2009/7 Volume 85 | pages 675 à 679

Et des articles sur le deux versions de Cat People.